Sur Amsterdam Global Village, de Johan van der Keuken

Extraits d'un avant-projet pour Amsterdam Global Village, Johan van der Keuken.

"Cinéma direct : la vérité de notre propre corps au milieu de ce qui est mis en mouvement autour de nous. Le direct au cinéma : le corps et la caméra se confondent le temps de la prise de vue, tant qu'on est en phase avec l'imprévisible qu'on a soi-même déclenché.

C'est sur la base de cette idée de Cinéma direct que je veux faire un film qui soit à la fois la continuation et l'opposé de "Face Value".

Un film qui abordera peut-être plus en profondeur les absurdités et les contradictions de notre époque. Un film dans lequel se côtoient par exemple : des gens qui fuient, un enfant qui perd sa mère, une mère qui perd son enfant - la jouissance des hommes qui vident le chargeur de leurs armes automatiques - un enfant qui fête son anniversaire, tout décontenancé devant la table chargée de cadeaux, il y en a trop - des éboueurs qui parcourent 35 kilomètres dans leur journée - un éboueur qui rentre chez lui en fin de journée ; a-t-il une femme ? Comment vivent-ils ? S'écroule-t-il de fatigue ? - un foyer d'immigrés en feu ; les gens qui regardent la famille turque que l'on tire hors de la fenêtre vers l'extérieur - un enfant que l'on pose dans son petit lit douillet - deux amoureux qui se caressent tendrement - un jeune néo-nazi qui s'explique avec sa mère ou qui écrit à sa mère de la prison où il est détenu pour avoir mis le feu à un foyer : par besoin de pureté, dit-il, tout est si pourri et confus - des Turcs qui foncent sur des Kurdes - ceux qui font l'amour et comment doit-on les filmer ? Le tout avec le sentiment de l'urgence".


"Aujourd'hui, j'ai de plus en plus le sentiment que ce n'est plus moi qui dirige le cadre, mais que j'ai simplement à suivre la caméra. Elle vole, et je vole derrière elle".

Extraits du livre Johan van der Keuken, Aventures d'un regard - Cahiers du Cinéma - 1998.